INTRODUCTION
HISTOIRE DU LONGBOARD EN
FRANCE
-1956
1957-1958
Le leash
1959-1960
BARLAND 59
1961-1962
1963-1964
1965-1966
URKIROLA
66
BARLAND
77
SOUVENIRS
HISTOIRE DU LONGBOARD DANS LE MONDE
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SOUVENIRS,
SOUVENIRS
Par
Guilhem Rainfray
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En
1966, j’avais 11ans et un vélo Peugeot « randonneur »
8 vitesses. C’est avec lui que, tous les après-midi,
je m’enfilais les virages de Bidart jusqu’à la Côte
des Basques. Jo MORAIZ avait une petite cabane blanche,
juste à côté du surf-club, où il louait des
planches. Maintenant que j’y repense, c’étaient
vraiment des planches à touristes, des gros « os »
qui finissaient là leur aventureuse existence après de
nombreuses réparations. La première vague de ma vie,
je l’ai prise sur un de ces vieux pétroliers
totalement plat, aux rails épais et ronds, à la dérive
en contreplaqué de la forme d’un quart de cercle, et
je me souviens qu’elle avait de grandes rayures bleu pâle.
Bien
sûr, j’aurais pu rester à Guéthary et m’inscrire
au Sporting, le club de plage tenu par la famille
TARDIF, parce qu’ils avaient, eux aussi, des planches.
Mais mes parents ne voulaient pas entendre parler de ce
sport terriblement dangereux. Et puis j’étais inscrit
au club des Pingouins, à l’autre bout de la plage, côté
port, et passer à l’ennemi était mal vu…
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L’année
d’après, c’est pourtant ce que j’ai fait. C’est
comme ça que j’ai fait la connaissance d’Esteban
ROSES, de Daniel PLISSON et de Johan FALSEN, entre
autres. Les planches « de chez TARDIF » étaient
comme toutes les planches de l’époque, lourdes et
plates. Il y avait deux ou trois BARLAND « de série »
recouvertes de gel-coat blanc, la propre planche de
Philippe TARDIF était une australienne avec une latte
d’un pouce de large et une déco bleu turquoise sur le
dessus. Cette planche avait une sœur jumelle de couleur
rouge/orange qui appartenait à la fille de M. et Mme
MERLE , lesquels tenaient la buvette du bout de la
plage. La dernière fois que j’ai vu |
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cette
planche, elle était chez MAURUS, il y a quelques années.
Et puis il y avait aussi une balsa antédiluvienne avec
une forme d’arrière extrêmement bizarre :
square-tail étroit mais rond sur le dessus. Et également
une autre vieillerie avec une forme de « pig »
très prononcé dont l’arrière était rond, forme
rare à l’époque. Chaque fois que je pouvais, je
prenais cette planche parce qu’elle était
incroyablement plus maniable que les autres.
C’est
ainsi que nous avons, petit à petit, « apprivoisé »
Guéthary, tous les quatre. Nous n’avions pas du tout
conscience de pratiquer le « longboard old school » :
c’est ce que tout le monde surfait, à l’époque, vu
qu’il n’y avait rien d’autre.
Vers
le milieu de l’été 67, j’ai enfin convaincu mon père
de m’aider à financer l’achat d’une planche bien
à moi. Je me souviens que le budget maximum avait été
fixé à 500 Francs de l’époque. Je me souviens aussi
que les « BILBO » neuves que Jo allait
chercher en Angleterre et qui nous faisaient baver dans
son antre de la rue Mazagran, étaient affichées,
elles, aux alentours de 600 Francs. J’avais emmené
mon père directement au surf-shop de Jo, espérant
trouver une « bonne occase ».
Malheureusement, Jo était absent et la jeune personne
qui gardait le shop en son absence ne put que nous
conseiller d’essayer de le retrouver à la Côte des
Basques. Ce que nous fîmes.
J’expliquai
à Jo le but de notre recherche et il m’orienta aussitôt
sur « un ami à lui, qui, justement, cherchait à
vendre une très belle planche… » L’ami nous
entraîna à l’intérieur du surf-club (qui, depuis, a
disparu sous l’éboulement de la falaise…) où étaient
rangées, comme à la parade, toutes les planches des
membres. Pour moi qui étais un parfait néophyte,
ignorant même de quel matériau était fait une
planche, elles me semblaient toutes plus belles les unes
que les autres. Quand l’ami de Jo s’arrêta devant
l’une d’elles, peinte en beige clair avec trois
lattes (on disait « nervures », alors) et
une dérive presque rectangulaire avec le logo « BARLAND/ROTT »
rouge et bleu sur chaque face, et qu’il commença à
me faire l’article (« …elle est en parfait état,
juste un petit « pet » ici, très bien réparé,
tu vois… ») j’étais déjà conquis, ne
pensant qu’à une chose : ramener cette merveille
à la maison. Ce que je fis, non sans que mon père ait
signé un chèque de… 550 Francs pour la merveille… |
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Mon
père avait cédé sur la planche en échange de la
promesse que je m’inscrirais à un club pour bénéficier
des conseils et de la « surveillance » des
plus grands. J’étais donc, depuis quelques jours,
inscrit à l’URKIROLA SURF CLUB de Guéthary où
j’avais fait la connaissance des frères SCHOLLE, des
frères LISTRE, de Michel BEAUCOURT (le photographe
attitré du club) et de tous les autres que
j’oublie… Lorsque j’arrivai au club ce jour-là,
fier comme Artaban avec ma gigantesque (et pesante)
BARLAND sous le bras, je m’attendais à des sifflets
admiratifs et à des commentaires élogieux. |
Au
lieu de ça, l’un des « grands » laissa
juste tomber un : « Hmouais… Je serais toi,
je gratterais la peinture… »
En
fin d’après-midi, Daniel et moi, en sueur, avions mis
à jour, à coups de racloir et de couteau, une bonne
trentaine de « pets » de toutes tailles et
de couleurs variées. J’ai toujours en mémoire le nom
de l’arnaqueur mais je ne le citerai pas ici…
Quelques jours plus tard, la dérive qui montrait une
longue fissure à la base, se désolidarisait de la
planche lors d’un virage mais je la retrouvai
miraculeusement dans les rochers. |
Désespéré,
je demandai conseil, une fois de plus, aux « grands ».
Il me fut répondu que je n’avais qu’à acheter un
peu de résine et de tissu de verre et à réparer.
Devant mon air niais (« résine ? »
« tissu de quoi ? ») et mon désarroi,
François SCHOLLE me proposa d’effectuer lui-même la
réparation, moyennant la somme minime de 50 Francs. |
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On
installa la planche en appui sur la balustrade du club
et François se mit à poncer au papier de verre toute
la base de la dérive et son emplacement sur la planche.
Puis il la fit tenir debout avec des rubans d’adhésif
collés aux rails (non sans oublier, en essayant de la
positionner la plus droite possible, de faire de
l’humour : « Tu préfères une planche qui
tourne à gauche ou à droite ? ») Il découpa
aux ciseaux une sorte de tissu aux reflets argentés
pour en faire des brins minuscules qu’il tassa contre
la |
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base,
puis il prépara la potion magique en versant un liquide
dans un autre un peu plus visqueux. A l’aide d’une
vieille cuillère, il mélangea les ingrédients.
L’odeur qui s’en échappait était forte, entêtante,
pas du tout désagréable. Avec ce mélange, il
entreprit d’imprégner le « duvet » qui
entourait la base. Et, devant mes yeux écarquillés, le
miracle s’accomplit : le duvet devint transparent comme
du cristal. François rajouta par dessus plusieurs
larges bandes du tissu argenté et, à chaque fois, le
miracle se reproduisit. Au contact du liquide, le tissu
devenait transparent et on voyait apparaître le logo
rouge et bleu. Quand la dérive eut été convenablement
« emballée » ainsi, François rangea son
petit matériel et me dit : « Tu laisses bien
sécher, et, quand ça ne colle plus, tu ponces. »
Je
me demande quelle tête vous feriez, aujourd’hui, si
vous arriviez chez un shaper pour récupérer votre
planche réparée et qu’il vous dise : « Tiens,
c’est fait. Tu laisses bien sécher, et quand ça ne
colle plus, tu ponces. Ca fera dix Euros. »
Moi,
je lui aurais baisé les pieds, en plus… C’est
probablement à lui que je dois d’avoir taillé (on ne
disait pas « shapé », à l’époque) ma
première planche. Et les quelques autres qui ont
suivi… L’été suivant, je m’offrais une vraie
planche, la GREEK « Maui Model » de Thierry
LISTRE, avec laquelle j’ai pris quelques unes des plus
belles vagues de ma vie. Mais ceci est une autre
histoire… |
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